Le vendredi 13 avril 2012

David Descôteaux
David Descôteaux est un des chroniqueurs économiques les plus lus au Québec. Son regard sur les enjeux économiques qui préoccupent chaque jour les Québécois fait jaser et réagir.Biographie complète
david.descoteaux - 12 avril 2012
On le réalise un peu plus chaque jour. Une bonne partie des gens contre la hausse des frais de scolarité le sont surtout par idéologie. Ils défendent un principe, un idéal. Ils évacuent de leur discours les contraintes du réel. Comme le budget. Peu importe que la dette nous sorte par les oreilles, il faut que l’éducation soit gratuite. Point!
Heureusement, certains sont plus allumés.
Des leaders étudiants d’associations universitaire (FEUQ) et collégiale (FECQ) proposent enfin de couper dans le gras! Des compressions de 300 millions $ sur cinq ans dans la gestion des universités, pour réinvestir l’argent dans la recherche et l’enseignement. Notamment en gelant des fonds liés à l’informatique, aux communications ou aux investissements immobiliers. En sabrant les budgets de gestion, et en diminuant les salaires des recteurs universitaires. (Personnellement, je me serais aussi attaqué à leurs pensions parfois scandaleuses, mais bon.)
Le but : limiter la hausse des droits de scolarité, tout en évitant d’accroître le fardeau fiscal des Québécois.
Il était temps!
Depuis quelque temps, je décourageais. Non seulement les étudiants semblent complètement déconnectés des réalités économiques de notre province, mais une bonne partie de la population aussi. Imaginez quand les vraies coupures tomberont! (Car elles viendront, préparez-vous. Les frais de scolarité ne sont qu’un début.)
On semble enfin réaliser que ce sont les contribuables québécois qui payent la « gratuité » scolaire, et non Jean Charest. Et que l’argent ne pousse pas dans les arbres.
Et en passant, pourquoi s’arrêter à 300 millions $? Du gras à couper, il y en a partout. Des fonds inutiles, des cadres trop payés et du gaspillage, ça existe dans tous les ministères. Probablement assez pour financer un gel des frais de scolarité jusqu’à 2084!
Qu’on se comprenne : les frais de scolarité devraient être ajustés à l’inflation, au minimum. Mais si vous me dites que l’accès à l’éducation doit être au sommet des priorités de l’État, alors ok. Ça se défend. Mais dans ce cas, vous avez la responsabilité de choisir ce qu’on sacrifie en échange de la gratuité scolaire. Car il existe une réalité budgétaire. Et si on ne sacrifie rien en échange, on perpétue cette logique destructrice qui consiste à croire que tout est gratuit. Qu’on n’a jamais à faire de choix. Cette logique qui nous entraîne chaque année plus près du gouffre. Et qui laisse aujourd’hui une dette de 250 milliards $ à nos enfants.
Les illuminés
Au sein du mouvement étudiant, une frange de communistes en herbe utilise les frais de scolarité comme moyen pour passer ses messages. Une poignée d’illuminés qui rêvent de transformer le Québec en Cuba à -30 degrés. Mais ça ne signifie pas qu’il faille aveuglément dénoncer les étudiants qui manifestent. N’oublions pas que cette hausse, c’est une autre tentative du gouvernement Charest de piger dans les poches de la population, pendant qu’il refuse de faire le ménage dans les dépenses de sa pieuvre gouvernementale. Vue sous cet angle, la hausse des droits de scolarité est aussi déplorable que les hausses de taxes sur l’essence, ou de la TVQ.
Il y a peu de chance que le gouvernement écoute. Mais en proposant des choix budgétaires, en plaçant Jean Charest devant son inaptitude à prioriser les dépenses de l’État, le mouvement étudiant a plus de chances de susciter la sympathie chez celui qui paye la facture : le contribuable. Beaucoup plus qu’en défendant à tout prix le statu quo. Comme un vulgaire groupe d’intérêt.
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maj.: 15 avril 2012
Nathalie Elgrably-Lévy
On récolte ce que l’on sème
Le Journal de Montréal, p. 23

Le bras de fer se poursuit entre les étudiants et le gouvernement du Québec. Dans ce dossier, l’État bénéficie de la sympathie de la majorité des citoyens. Pourtant, il est partiellement responsable de l’attitude des étudiants, car il a lui-même, jadis, semé les graines du mécontentement.
En 1997, la ministre de l’Éducation, Pauline Marois, avait annoncé son plan d’action pour la réforme de l’éducation. Ses intentions étaient claires : passer de « l’accès du plus grand nombre au succès du plus grand nombre ». Elle avait même fixé des cibles pour le taux de diplomation.
Puis, en 2000, c’était au tour de son successeur, François Legault, de dévoiler sa Politique québécoise de financement des universités et d’annoncer l’instauration de contrats de performance.
Dans ces contrats, l’État obligeait les universités à se fixer des cibles de performance (dont les grands thèmes étaient imposés par le ministère de l’Éducation) et, en contrepartie, il s’engageait à augmenter le financement des institutions qui atteignent leurs objectifs.
La hausse du taux de diplomation était l’un des critères de performance.
Nivellement par le bas
Ne soyons pas naïfs! Le nivellement par le bas est le moyen le plus simple et le plus rapide d’augmenter les taux de réussite et c’est précisément l’avenue empruntée par de nombreux établissements d’enseignement. Aujourd’hui, les nouveaux analphabètes fonctionnels ont en fait fréquenté l’école jusqu’à 16 ans. Voilà qui en dit long sur la qualité de l’enseignement au secondaire!
Comme les élèves qui terminent le secondaire sont moins bien formés, les cégeps doivent ensuite adapter leurs programmes à cette nouvelle clientèle.
Ensuite, c’est au tour des universités de revoir leurs exigences à la baisse, d’une part pour tenir compte des capacités des étudiants et, d’autre part, pour atteindre le taux de diplomation visé. C’est ainsi qu’au lieu de réformer l’éducation, notre ministère l’a plutôt déformée.
Le nivellement par le bas est d’ailleurs confirmé par ce qu’il est convenu d’appeler « l’inflation des notes », un phénomène amplement documenté.
Deux chercheurs canadiens, James Côté et Anton Allahar, ont d’ailleurs montré que la note moyenne qui était de C il y a 30 ans oscille aujourd’hui entre B+ et A-.
Dévalorisation des diplômes
La classe politique voulait démocratiser l’éducation. Force est de constater que ses initiatives se sont soldées par la dévalorisation des diplômes.
Or, les employeurs ne sont pas dupes, ils ont ajusté les salaires en conséquence. L’Annuaire québécois des statistiques du travail indique d’ailleurs que, de 2000 à 2010, des diplômés universitaires ont vu leur rémunération horaire croître plus lentement que n’importe quel autre groupe. C’est aussi le groupe où le nombre de chômeurs a augmenté le plus vite.
Nul doute que les étudiants doivent payer pour leur éducation. Mais, de grâce, ne banalisons pas les diplômes! Quand les établissements d’enseignement ne seront plus obligés de privilégier le taux de diplomation, quand ils abandonneront le nivellement par le bas et qu’ils privilégieront la qualité des diplômes plutôt que le pourcentage de diplômés, les étudiants pourraient alors accepter plus facilement une hausse des frais de scolarité!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
source -> http://www.iedm.org/
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maj.: 3 juin 2012
timeline -> boycot étudiant (#GGI)
| DominicArpin @xkr C'est tellement mérité. Même que je suis un peu jaloux de ne pas avoir eu l'idée ;-) 12-06-03 08:18 |
| xkr Le jour où @DominicArpin te lève son chapeau... http://t.co/fymWZtPz #ggi #manifencours #assnat #polqc 12-06-03 08:04 |

