source -> http://www.scribd.com/doc/65126106/Le-rapport-de-l-Unite-anticollusion
Radio-Canada
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Rapport Duchesneau: Jean Charest invite à la prudence avec les «allégations»
Photo : Jacques Nadeau – Le Devoir
Le premier ministre du Québec avait convoqué la presse, aujourd'hui à Montréal, pour énumérer les actions qu’il a prises, ces derniers mois, afin de lutter contre la collusion.
Sans aller jusqu’à dénigrer le rapport Duchesneau, le premier ministre Jean Charest a laissé entendre, aujourd'hui, qu’il était basé sur des «allégations». Pour cette raison, il a invité les gens à la prudence.
Le rapport Duchesneau, qui a fait l’objet de fuites à Radio-Canada et dans La Presse, avant d’être finalement rendu disponible sur le site Web de Radio-Canada, a levé le voile sur un système organisé et assez répandu de collusion dans le domaine du transport, qui implique des entreprises de construction ainsi que des firmes de génie-conseil et le financement de partis politiques.
Le premier ministre du Québec avait donc convoqué la presse, aujourd'hui à Montréal, pour énumérer les actions qu’il a prises, ces derniers mois, afin de lutter contre la collusion, aux côtés de ses ministres des Transports, Pierre Moreau, et de la Sécurité publique, Robert Dutil.
Tout au long de la conférence, le premier ministre a invité les journalistes à «faire attention» avec les allégations, avec les exagérations. Il n’a toutefois pas clairement affirmé que le rapport Duchesneau contenait des exagérations et n’a pas non plus répondu directement lorsque la question lui a été posée à savoir s’il croyait que le rapport Duchesneau contenait des exagérations.
«Il faut faire la part des choses dans tout ça. Il peut y avoir des allégations; il peut y avoir des gens qui pensent des choses, mais entre penser des choses, des allégations et la réalité, les faits, il y a une distance», a-t-il affirmé. «Moi je fais la part des choses. Il ne faut pas non plus tomber dans des exagérations, alors que dans les faits, nous agissons avec beaucoup de détermination», s’est-il défendu.
Le premier ministre a avoué candidement qu’il n’avait pas lu le rapport Duchesneau de l’Unité anticollusion et qu’il n’en avait lu que des reportages dans les médias. Il a justifié cela par le fait que le rapport n’était pas destiné au premier ministre, mais au ministère des Transports.
Le premier ministre a par ailleurs nié banaliser ce rapport et assure qu’il n’est «pas du tout» dans la défensive face à ce rapport, qui évoque pourtant un risque que des pans entiers des fonctions de l’État tombent entre les mains d’intérêts malveillants, si le phénomène de collusion continue de prendre de l’ampleur.
«La réalité, c’est que dans le domaine de la construction, malheureusement, c’est un phénomène qui existe partout dans le monde. Au Québec, il y a eu des allégations et il faut répondre à ça», a commenté le premier ministre.
Le ministre Moreau a par ailleurs réitéré sa déclaration de la veille voulant que 13 dossiers contenant des informations nominatives et plus précises, dans le rapport Duchesneau, avaient été remis à l’Unité permanente anticorruption (UPAC), et ce, même après que l’UPAC ait nié avoir reçu ces 13 dossiers.
Il a cette fois précisé avoir lu cette information dans le rapport Duchesneau lui-même, qui fait référence à ces 13 dossiers contenant des informations plus détaillées et qui auraient été référés à l’UPAC.
Le ministre Moreau a par ailleurs souligné qu’une rencontre avait déjà été planifiée entre Jacques Duchesneau et la sous-ministre du ministère des Transports pour voir avec lui «de quelles façons ses recommandations pouvaient être mises en application et quelles étaient selon lui les meilleurs moyens pour y parvenir». D’autres rencontres à ce sujet sont prévues.
Le rapport Duchesneau, qui a fait l’objet de fuites à Radio-Canada et dans La Presse, avant d’être finalement rendu disponible sur le site Web de Radio-Canada, a levé le voile sur un système organisé et assez répandu de collusion dans le domaine du transport, qui implique des entreprises de construction ainsi que des firmes de génie-conseil et le financement de partis politiques.
Le premier ministre du Québec avait donc convoqué la presse, aujourd'hui à Montréal, pour énumérer les actions qu’il a prises, ces derniers mois, afin de lutter contre la collusion, aux côtés de ses ministres des Transports, Pierre Moreau, et de la Sécurité publique, Robert Dutil.
Tout au long de la conférence, le premier ministre a invité les journalistes à «faire attention» avec les allégations, avec les exagérations. Il n’a toutefois pas clairement affirmé que le rapport Duchesneau contenait des exagérations et n’a pas non plus répondu directement lorsque la question lui a été posée à savoir s’il croyait que le rapport Duchesneau contenait des exagérations.
«Il faut faire la part des choses dans tout ça. Il peut y avoir des allégations; il peut y avoir des gens qui pensent des choses, mais entre penser des choses, des allégations et la réalité, les faits, il y a une distance», a-t-il affirmé. «Moi je fais la part des choses. Il ne faut pas non plus tomber dans des exagérations, alors que dans les faits, nous agissons avec beaucoup de détermination», s’est-il défendu.
Le premier ministre a avoué candidement qu’il n’avait pas lu le rapport Duchesneau de l’Unité anticollusion et qu’il n’en avait lu que des reportages dans les médias. Il a justifié cela par le fait que le rapport n’était pas destiné au premier ministre, mais au ministère des Transports.
Le premier ministre a par ailleurs nié banaliser ce rapport et assure qu’il n’est «pas du tout» dans la défensive face à ce rapport, qui évoque pourtant un risque que des pans entiers des fonctions de l’État tombent entre les mains d’intérêts malveillants, si le phénomène de collusion continue de prendre de l’ampleur.
«La réalité, c’est que dans le domaine de la construction, malheureusement, c’est un phénomène qui existe partout dans le monde. Au Québec, il y a eu des allégations et il faut répondre à ça», a commenté le premier ministre.
Le ministre Moreau a par ailleurs réitéré sa déclaration de la veille voulant que 13 dossiers contenant des informations nominatives et plus précises, dans le rapport Duchesneau, avaient été remis à l’Unité permanente anticorruption (UPAC), et ce, même après que l’UPAC ait nié avoir reçu ces 13 dossiers.
Il a cette fois précisé avoir lu cette information dans le rapport Duchesneau lui-même, qui fait référence à ces 13 dossiers contenant des informations plus détaillées et qui auraient été référés à l’UPAC.
Le ministre Moreau a par ailleurs souligné qu’une rencontre avait déjà été planifiée entre Jacques Duchesneau et la sous-ministre du ministère des Transports pour voir avec lui «de quelles façons ses recommandations pouvaient être mises en application et quelles étaient selon lui les meilleurs moyens pour y parvenir». D’autres rencontres à ce sujet sont prévues.
source -> http://www.ledevoir.com/
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Les malversations dans l'industrie de la construction ont pris une telle ampleur que le Québec risque carrément une «prise de contrôle de certaines fonctions de l'État» par des acteurs mal intentionnés, prévient l'Unité anticollusion dans un rapport secret.
Ce rapport, que La Presse a obtenu, décrit les modus operandi du crime organisé, des firmes de génie-conseil, des entrepreneurs et des partis politiques.
«Les soupçons sont persistants qu'un empire malfaisant est à se consolider dans le domaine de la construction routière», affirme Jacques Duchesneau, dirigeant de l'Unité, en préambule du document.
«S'il devait y avoir une intensification du trafic d'influence dans la sphère politique, on ne parlerait plus simplement d'activités criminelles marginales, ni même parallèles: on pourrait soupçonner une infiltration voire une prise de contrôle de certaines fonctions de l'État ou des municipalités», lit-on plus loin.
En plus d'un an de travail, l'équipe de Jacques Duchesneau a découvert un système d'une «ampleur insoupçonnée», infiltré massivement par le crime organisé, qui permet de gonfler de façon démesurée les coûts des travaux routiers.
Les enquêteurs confirment qu'un grand nombre d'entreprises de construction entretiennent des liens avec des organisations criminelles.
«On présume donc fortement que certaines jouent d'influence sur les contrats octroyés par le gouvernement, voire qu'elles ont déjà mis les pieds sur les chantiers mêmes du ministère», dit le rapport.
Outre les motards et la mafia, des groupes d'entrepreneurs généraux eux-mêmes «fonctionnent comme des cartels» pour éliminer la concurrence et organiser la collusion, poursuit le document. Et l'omerta règne dans l'industrie.
«Tout le monde a peur. La mafia est impliquée là-dedans, et les motards, donc t'as intérêt à te mêler de tes affaires», a confié une source interviewée pendant l'enquête.
Des «extras» coûteux
Des employés du ministère des Transports et des firmes de génie auraient par ailleurs coulé des informations privilégiées à des entrepreneurs pour leur permettre de préparer leurs soumissions.
Les enquêteurs constatent aussi que les entreprises soumissionnent à un bas prix en sachant à l'avance qu'elles rempliront quand même leurs coffres grâce aux «extras» facturés en surplus.
Certaines firmes emploieraient même des spécialistes des «extras» qui empochent 10% de commission sur ce qu'ils arrivent à faire payer au gouvernement.
Un ingénieur ayant travaillé dans différentes firmes de génie-conseil a aussi dévoilé un stratagème utilisé pour constituer des caisses occultes.
«Mettons que l'ingénieur de la firme chargée de la surveillance doit autoriser un extra de 100 000$ pour des travaux supplémentaires. Il trouve le moyen d'aller chercher le double auprès du MTQ. Il y a donc un 100 000$ blanchi à se partager: la firme pourra l'utiliser pour contribuer à des caisses électorales et l'entrepreneur pour payer ses travailleurs au noir», a-t-il révélé aux enquêteurs.
Des firmes de génie manquent «d'exactitude et d'imputabilité», alors qu'en même temps, le ministère leur laisse le champ libre car il manque «d'expertise et de vigilance», précise le document. «Pendant que les firmes se développent une expertise inestimable, le ministère perd inexorablement la sienne», y lit-on.
Financement politique
Les politiciens ne sont pas épargnés par le rapport. Un ex-conseiller politique a témoigné que les partis se financent massivement grâce aux dons des firmes de génie-conseil et de construction, ce qui donne aux entreprises un accès aux politiciens.
«Plus ils ont de contrats, plus ils donnent; plus ils donnent, plus ils ont de l'influence; plus ils ont de l'influence, plus ils ont de contrats. Et cette influence, ils l'exercent ensuite partout via l'argent public, que ce soit en siégeant sur des fondations ou en faisant des levées de fonds pour des oeuvres caritatives. Ils deviennent presque intouchables», a expliqué l'ex-conseiller.
Le rapport ne donne aucun nom d'entreprise ou d'individus. Ce sont les policiers et procureurs de la Couronne qui seront chargés d'accuser ceux qui auraient brisé la loi.
Ce n'est pas la première fois que l'on montre du doigt le rôle joué par les firmes de génie-conseil dans le financement occulte des partis, dans la collusion ainsi que dans les dépassements de coûts.
Lors de la vague d'arrestations survenue en février dernier à Boisbriand et qui avait visé entre autres la vice-présidente du groupe Roche, le capitaine Éric Martin, de l'opération Marteau, avait déclaré ceci à La Presse: «Pour faire avancer des projets de construction, ou pour qu'ils soient autorisés, [les firmes] ont besoin de financer des partis politiques. Elles vont demander à des collaborateurs ou à des employés de commettre des fraudes par supercherie, mensonge ou autres moyens. Elles vont fabriquer de fausses factures ou facturer des services jamais réalisés.»
L'an dernier, après une plainte du député Amir Khadir, le groupe Axor a plaidé coupable à une quarantaine d'infractions pour avoir versé plus de 150 000 $ au PLQ, au PQ et à l'ADQ grâce à des prête-noms.
Parmi ses 50 recommandations au gouvernement, l'Unité insiste sur l'importance de serrer la vis aux firmes de génie-conseil et renforcer la fonction publique. Elle propose d'offrir aux fonctionnaires des séances «d'une heure sur la collusion, comportant un volet sur le crime organisé».
Le ministre des Transports, Pierre Moreau, s'est dit heureux que le Ministère «ait fait les gestes nécessaires» en mandatant Jacques Duchesneau l'an dernier, mais il balaie d'un revers de main les constats accablants pour son ministère contenus dans le rapport. Il faudra vérifier le bien-fondé de ces conclusions, explique-t-il.
- Avec la collaboration de Denis Lessard
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RAPPORT DE L'UNITÉ ANTICOLLUSION
Les extraits les plus percutants
Le génie-conseil
«On peut se demander s'il est approprié que les firmes de génie-conseil soient chargées à la fois des plans et devis, des estimations de référence et de surveillance des chantiers, et s'il ne serait pas opportun de faire appel par exemple à des experts indépendants pour vérifier la justesse des estimations.»
«Quand le ministère accepte les plans et devis tels que les ont préparés les firmes de génie-conseil qu'il a engagées, sans faire même appel à son sens critique, on peut le croire également incapable d'exercer la vigilance attendue de lui face aux risques de collusion entre ces firmes et des entrepreneurs.»
«Un ingénieur sur trois aurait déjà été témoin de favoritisme dans une entreprise pour laquelle il a travaillé.»
«Un ingénieur prévoit 1000 chargements de terre contaminée sur un site, alors qu'il sait pertinemment que seuls 100 chargements seront nécessaires. En communiquant cette information à un entrepreneur ciblé, il peut lui faire miroiter l'économie de 900 chargements qui avantagera sa soumission.»
«Le MTQ a trop materné les firmes d'ingénieurs-conseils et cela a engendré un manque d'imputabilité.»
«Le MTQ n'a mis en place aucun système pour sanctionner les firmes de génie-conseil qui font de la mauvaise conception de plans et devis [...]. Ces firmes ne fonctionnent pas avec la peur du bâton, mais avec une carotte en avant d'eux.»
Les entrepreneurs et la collusion
«En ce qui a trait aux entrepreneurs, leur nombre est strictement contrôlé. Des rencontres discrètes tenues dans le cadre d'associations professionnelles fournissent par exemple l'occasion de resserrer les normes de l'industrie de façon à limiter de nouvelles entrées. Le cas échéant, on invite un nouveau joueur trié sur le volet à faire partie d'un cartel ou alors on les achète, ou encore, s'ils sont quelque un on les en de diverses manières.»
«Certains entrepreneurs qui ne coopèrent pas à de la collusion sont victimes de menaces et d'intimidation de la part de concurrents parfois associés à des organisations criminelles. Il n'est pas rare qu'ils doivent faire face à des représailles, prenant parfois la forme de difficultés d'approvisionnement en matériaux.»
«Plus de 60 000 luminaires et 2000 tours de lampadaires se retrouvent sur les routes et autoroutes sous la responsabilité du ministère. Un unique fournisseur contrôle la majeure partie du marché des luminaires alors que deux fabricants et distributeurs de hauts mâts et lampadaires se partagent quant à eux la quasi-totalité de ces ventes. [...] Comme dans le cas d'un cartel, il n'y a pas de concurrence possible.»
«Au Québec, parmi les centrales d'enrobage nécessaire à la confection de l'asphalte, 42 appartiennent à la même entreprise, et 20 à une autre, toutes deux clairement en position de force. À elles seules en 2009, elles décrochaient 42% du montant total des contrats. Il faut briser la gamic, nous a-t-on d'ailleurs confié.»
«Comment ne pas trouver aberrant que certains, reconnus coupables de collusion et de fraude, puissent continuer de recevoir des contrats publics? Il est arrivé qu'une entreprise ait changé d'identité juridique, tout en conservant ses mêmes administrateurs, ce qui lui a valu de redevenir admissible à l'obtention de contrats du ministère.»
Le crime organisé
«Un proche des Hells Angels fait savoir que «tout ce qui est asphalte à Montréal et aux alentours, on l'a toute».»
«Lors de la tenue de son procès en 2004, pour assurer sa défense, un membre influent de la mafia a pu compter sur le soutien financier d'une importante entreprise de construction québécoise.»