Montréal sur la carte

Publié le 10 août 2011 à 06h45 





À la même date, l'an dernier, personne ne parlait ouvertement de projets de chefs de réputation internationale à Montréal. Quand il était question de tables satellites lancées par les stars de la gastronomie dans les grandes villes du monde, on pensait Vegas, Tokyo, Londres et New York, évidemment.
Pourtant, aujourd'hui, Montréal est aussi dans ce circuit.
L'étoilé et très télégénique chef Gordon Ramsay, M. Londres et Los Angeles, était en ville hier pour la réouverture du Laurier, qui portera maintenant aussi son nom. En juin, le Franco-New-Yorkais Daniel Boulud, autre mégastar installée autant à Palm Beach qu'à Pékin, est venu préparer sa Maison Boulud au Ritz, rue Sherbrooke. On nous annoncerait l'arrivée d'Alain Ducasse au sommet de la Place Ville-Marie ou de Joël Robuchon au restaurant Hélène-de-Champlain, dans l'île Sainte-Hélène, que nous n'en serions pas nécessairement surpris. (En fait, j'y pense: peut-être que Martha Stewart devrait venir transformer le chalet du mont Royal?)
Que s'est-il passé pour que Montréal devienne soudain un tel pôle d'attraction? La hausse du dollar a pourtant effacé cet incroyable avantage qui nous rendait si bon marché. Calgary est la ville du moment côté croissance et pouvoir d'achat. Toronto est d'habitude la première sinon la seule à voir ouvrir chez elle toutes sortes de succursales de chaînes étrangères haut de gamme, de type Williams-Sonoma ou Whole Foods...
Y aurait-il un buzz particulier autour de Montréal?
«Ah oui, absolument, sans le moindre doute», m'a répondu hier M. Ramsay lui-même, lors d'une entrevue de 9 minutes 13 secondes. Comment le sait-il? Ça se sait, ça se dit. Il faut lire les blogues, explique-t-il. Ou alors sonder l'univers des chefs, ceux qui sont dans l'ombre, qui travaillent partout, échangent entre eux, parlent notamment des produits, des fournisseurs. Tous ces gens cachés du monde de la cuisine qui font écho aux tendances quand ils ne sont pas carrément en train de les lancer.
«Ça me fait penser à ce qu'a vécu Londres il y a 10 ou 12 ans, précise Ramsay. Il y a énormément de talents, ici.» Il parle d'une certaine énergie dans l'air. D'une communauté de gens de cuisine tissée serrée. Il va même jusqu'à demander à haute voix qui pourrait être le prochain grand restaurateur attiré ici et lance des noms: Jean-George Vongerichten? Nobu?
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Ramsay, que les journalistes ont pu rencontrer à Montréal hier, première occasion officielle depuis l'annonce de sa venue l'automne dernier, dit qu'il est tombé amoureux de la ville il y a cinq ans, au cours d'un voyage de chasse à l'oie. L'atmosphère lui a rappelé le Paris de ses années de formation, où il a appris à parler français.
Le Pied de cochon avait déjà commencé à créer une nouvelle effervescence en attirant une foule internationale d'amateurs de cuisine carnée et beurrée, le chef et auteur américain Anthony Bourdain en tête.
Gordon Ramsay n'a pas décidé de donner son nom à un établissement québécois en regardant la grande carte du monde et en choisissant Montréal parmi d'autres villes. Avis à Edmonton, Whistler, Toronto et à toutes les autres municipalités canadiennes qui, dit M. Ramsay, lui demandent aujourd'hui encore pourquoi il ne les a pas choisies.
Comme c'est souvent le cas en affaires, l'occasion s'est présentée. Danny Levy, commerçant montréalais spécialiste des outils de cuisine avec qui le Britannique travaillait déjà, et qui venait d'acheter le bâtiment de la famille Laporte, tout juste à la frontière d'Outremont et du Mile End, lui a parlé du projet. Le reste a suivi. Ramsay, qui a notamment tenu la vedette d'une série de téléréalité sur la relance de restaurants moribonds, a accepté de plonger.
Le chef s'est alors vu comme Alain Ducasse devant le Benoît, un bistrot parisien plus que classique aux abords du Marais, ressuscité par le grand chef français.
Aujourd'hui, Ramsay espère-t-il que le restaurant devienne une attraction touristique? Non. Ce n'est pas le but du projet, dit-il. Mais il aimerait bien que Le Laurier soit l'une de ces institutions que l'on visite quand on vient découvrir Montréal. Après tout, avec ses 70 ans bien sonnés, c'est une des tables les plus anciennes de la cité.
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Pour ceux qui me posent la question depuis le début de la semaine: non, je n'ai pas encore goûté à la cuisine du nouveau Laurier. Je suis allée à la conférence de presse hier et j'ai interviewé le chef Ramsay, mais je n'ai rien mangé. Et je ne suis pas allée au cocktail de lancement. J'irai un autre jour, à l'improviste, avec addition. On s'en reparlera alors.
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Gordon Ramsay Plays Chicken


Guillermo Russo with Gordon Ramsay.
Guillermo Russo with Gordon Ramsay.
One morning last week, after appearing on Jay Leno,then catching the red-eye flight to Montreal, Gordon Ramsay stood before a number of reporters and cameramen, smiling and massaging a roast chicken. Behind him, encased in glass, more chickens twirled slowly on a rotisserie spit, flames leaping menacingly from below. It was all very “Hell’s Kitchen.”
He was in Montreal to christen Gordon Ramsay Laurier, his re-imagining of a 75-year-old rotisserie chicken joint called Laurier BBQ, and by end of day he’d be on a plane back to London. In a story line plucked straight out of a Kitchen Nightmares episode, Ramsay (or Gordon Ramsay Holdings Ltd.) swooped in to revive the French-Canadian, family-style landmark that was dying a slow death. It’s a move that has caused many Montrealers to wonder: Why on earth?
“It’s been a tough time these past two and a half years for any chef, any business,” Ramsay told me during our five-minute chat in the company of two publicists.
“I experienced that in 2008,” he says, alluding to his own company’s near-fatal flirtation with bankruptcy. “It doesn’t make sense to come in and try to be the best fine dining restaurant in Montreal.” And so he has gotten into the local comfort food business, providing consultation services and hiring the local chef Guillermo Russo, 31, to run the show.
Ramsay himself is a bit too busy to be slinging chickens in Montreal. He has more than two dozen restaurants on four continents and loads of TV commitments (last year alone he starred in “MasterChef” and “Hell’s Kitchen” in the United States, and “Ramsey’s Best Restaurant” and “Christmas With Gordon” in the U.K.) — and also cookbooks, product endorsements and the odd tabloid scandal to juggle. Yet this down-market shift shouldn’t come as a surprise, given his empire’s rapid expansion over the past decade. What better way to reach the TV-watching masses than with chicken?
DESCRIPTIONRamsay embraces the old and the new in his re-imagining of Laurier BBQ.
The old Laurier BBQ, with its authentically retro, wood-paneled dining room adorned with hunting memorabilia, catered to a small, loyal and largely older clientele. It was one of those places nobody really went anymore — most of us ordered in, or stopped in occasionally for the kitsch factor. But when news broke of the takeover, there was a great kerfuffle over the celebrity chef’s plans to chic-ify the suddenly beloved Montreal institution. Team Ramsay has indeed given the place a sleek face-lift, but they’ve gone to great lengths to assure locals that the spirit of the place is unchanged.
“It reminds me of taking over at Claridge’s 10 years ago, and even before I got anywhere near the place, British Heritage wanting to have a word saying, ‘You cannot touch that marble and you are not going anywhere near those mirrors,’ ” Ramsay says. Except at Claridge’s, there’s no poutine. “Yeah, everyone thinks if you’ve got three Michelin stars you’ll think poutine is a pile of crap, but I grew up on chips and gravy,” he continued. “So why can’t we do poutine with the most amazing French fries, hand-cut, hand-peeled potatoes with the most amazing gravy?”
That Ramsay razzle-dazzle was looking a bit doused the following day, when on the first evening the restaurant was open to the public a sprinkler system malfunction and forced the evacuation of hundreds of patrons. The restaurant was shut for two days. Whether this is a bad omen or merely a bump in the road — there’s even been talk of an international chain of Ramsay rotisseries — only time will tell.