AU SECOURS, KEYNES, AU SECOURS !
RUDY LE COURS
LA PRESSE

Qu’ont en commun le Canada et la Chine ces jours-ci, outre une grande fenêtre sur le Pacifique ?

Un passage à vide économique, le taux directeur de leur banque centrale respective à des creux historiques ou presque et les moyens financiers enviables de leur gouvernement pour stimuler la croissance.

Bref, toutes les conditions réunies pour s’inspirer de John Maynard Keynes. L’économiste britannique préconise notamment de tonifier l’activité économique en stimulant les investissements publics, à commencer par les infrastructures, en période d’anémie économique.

La Banque populaire de Chine a abaissé son taux directeur cette semaine, une cinquième fois en moins d’un an. À 4,60 %, il peut sembler élevé selon les standards actuels des économies avancées, mais il est à son niveau historique le plus faible.

La Banque du Canada a, quant à elle, abaissé son taux directeur deux fois cette année. À 0,50 %, il n’est qu’à un quart de point de pourcentage de son creux historique, fixé pendant la Grande Récession.

Une autre baisse risque fort de s’avérer un coup d’épée dans l’eau, tant les institutions financières l’accompagnent à contrecœur dans cette ronde d’assouplissement.

En 2009, quand le gouverneur Mark Carney et son équipe avaient abaissé le taux directeur à 0,25 %, elles avaient fixé leur taux préférentiel, celui auquel elles prêtent à leurs meilleurs clients, à 2,25 %, soit deux points de pourcentage de plus. Présentement, le taux préférentiel se situe à 2,70 %, soit 2,20 points de plus. L’écart de 20 centièmes s’est creusé à chacune des deux baisses du taux directeur décrétées par Stephen Poloz. Il serait assez étonnant qu’une éventuelle troisième baisse se reflète entièrement sur le taux préférentiel.

Dans une entrevue accordée cette semaine à la BBC, le réputé gouverneur de la Banque de réserve de l’Inde Raghuram Rajan a affirmé que les gouvernements comptent trop sur les banquiers centraux, à ses yeux, pour régler les problèmes de l’économie mondiale. Trop de détente, selon lui, peut même avoir des effets contraires à ceux qui sont visés. C’est avant tout aux gouvernements et aux entreprises de s’attaquer à des problèmes de compétitivité ou de rotation des moteurs de la croissance.

Les autorités chinoises tentent de faire reposer l’expansion de l’activité économique davantage sur la demande intérieure que sur les exportations, alors que le Canada tente de relancer ses exportations manufacturières pour prendre le relais des ressources sur lesquelles l’expansion a avant tout reposé depuis le début du présent cycle.

Dans les deux cas, le relais est plus lent et plus laborieux que prévu.

La dévaluation de la monnaie orchestrée par la Banque centrale ou découlant de la politique monétaire peut avoir l’effet d’un coup de fouet sur un attelage, mais il faut un bon cocher pour garder le rythme et négocier les virages.

Dans le cas présent, le cocher, c’est l’État au sens large. On peut parier que Pékin va tout tenter pour remettre l’économie sur sa voie, ne serait-ce que pour apaiser le mécontentement de la classe moyenne durement touchée par le krach de la Bourse de Shanghai.

Chez nous, les perspectives sont moins nettes. La croissance réelle est plus faible que le scénario de 2,0 % plutôt rose esquissé par le ministre des Finances Joe Oliver dans son budget du 21 avril. La Banque du Canada voyait 1,1 % le mois dernier, avant le nouvel affaissement des cours du brut dont les effets se feront sentir encore l’an prochain. La Banque Nationale vient d’ailleurs tout juste de ramener de 1,9 % à 1,6 % sa prévision pour 2016. Le scénario d’Ottawa est plutôt de 2,2 %.

En ne faisant rien, Ottawa se dirige toit droit vers une nouvelle série de déficits.

Dans le plan budgétaire du ministre Oliver, il est précisé qu’une différence d’un point de pourcentage du produit intérieur brut réel entraîne une diminution de 4,1 milliards du solde budgétaire la première année, de 4,7 milliards la deuxième. Le manque à gagner est plus grand encore si la croissance recule davantage lorsqu’on l’exprime en dollars courants. C’est ce qui arrive au Canada, compte tenu de l’effondrement des prix du pétrole et des métaux de base (aluminium, cuivre, étain, fer, plomb et zinc) dont il est grand producteur et exportateur.

M. Oliver a prévu un surplus de 1,4 milliard cette année et de 1,7 milliard l’an prochain.

On imagine aisément l’effet néfaste sur les finances publiques de deux surestimations d’affilée de la croissance.

Ottawa doit tenter de redynamiser l’activité économique, quitte à s’endetter davantage à court terme. Avec une note de crédit AAA et des coûts d’emprunt à des creux historiques, il jouit d’une situation enviable pour ce faire.

Il est navrant de constater que les partis politiques qui font campagne refusent jusqu’ici de prendre le taureau par les cornes en osant présenter la situation telle qu’elle est et en proposant des voies de solution.

source -> http://plus.lapresse.ca/



HuffPostQuebec
Déficits autres temps, autres circonstances, dit Paul Martin (SRC) #PLC #Fed2015
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2015-08-29 17:36


Lactualite
L’argument économique en politique | Billet de @duhamelp #elxn42
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2015-08-29 19:20



La drôlerie est remarquable dans le cas des libéraux. Justin Trudeau ramène à notre bon souvenir la prudente gestion budgétaire de Paul Martin quand il était ministre des Finances, tout en nous promettant du même souffle — et sans y voir aucune contradiction — trois années de déficits supplémentaires pour dynamiser l’économie.

Justin Trudeau a néanmoins raison sur un point. S’il y a un nouveau gouvernement, il nous fera immanquablement le coup du «c’est pire qu’on pensait» pour justifier soit un autre déficit, soit de nouvelles compressions.

Trudeau veut augmenter les investissements en infrastructures du gouvernement fédéral, ce qui occasionnera un déficit budgétaire de 10 milliards par année pendant trois ans. À l’entendre, ces 10 milliards feraient toute la différence du monde pour propulser notre économie. Pensez-y deux minutes : la croissance du pays dépendrait de 10 milliards de dépenses publiques supplémentaires dans une économie de 1 648 milliards. C’est à peu près l’équivalent de vous avancer d’un pied sur un trou de golf de 570 verges.

En revanche, cela pèse sur un endettement public élevé qui a pris un sérieux embonpoint depuis six ans.

Les politiciens sont incorrigibles, et les électeurs ne demandent qu’à être séduits.