Une manif au parfum de pétrole


PHOTO LE JOURNAL DE QUÉBEC, DANIEL MALLARD

Ils étaient près de 25 000, hier, dans les rues du Vieux-Québec, à l’occasion de la Marche Action Climat.

À Québec, samedi, ils marchaient pour le climat en souriant aux caméras. Nos inévitables leaders syndicaux s’étaient rangés derrière des banderoles demandant un développement durable et l’abandon du pétrole.

Ils s’étaient joints à des jeunes sincèrement convaincus alors qu’eux-mêmes ne pouvaient vraisemblablement pas avoir bonne conscience. On peut se demander ce qu’ils faisaient là exactement.

Le plus inconfortable devait être Serge Cadieux, le big boss de la FTQ. Car il y a place au malaise quand on parade avec Équiterre et Greenpeace alors que le Fonds de solidarité brasse 200 millions d’investissements dans le pétrole, le gaz de schiste, les pipelines et les sables bitumineux. De l’argent sonnant chez Enbridge, TransCanada Pipeline, Schulmberger, Canadian Oil Sands, sans parler de Cabot et de Concho qui ont transformé la Pennsylvanie en gruyère pour siphonner du gaz de schiste.

La CSN aussi

La FTQ n’est pas la seule à jouer au théâtre du développement durable. La CSN a aussi du pétrole sur les doigts. Les caisses de retraite des profs de l’UQÀM et de l’Université de Montréal ont aussi du fric dans le pétrole. Alors quand vous reverrez les censeurs de l’ASSÉ assis avec eux pour plaider la fin des hydrocarbures, pensez à M. Pignon au dîner de cons.

Le réseau de l’Université du Québec (et donc l’inénarrable UQÀM) compte notamment sur Journey Energy de Calgary qui produit et vend des hydrocarbures tirés du fractionnement souterrain. Dans son dernier rapport annuel, on note que les pertes d’autres secteurs ont été partiellement neutralisées par les gains dans le pétrole. Une telle candeur donne presque envie de marcher à gauche...

Appuyant leurs collègues de l’UQÀM dans la guéguerre contre le contrôle des dépenses, les profs (et les retraités) de l’Université de Montréal profitent de leur côté de placements chez Suncor, Canadian Natural Ressources et — tiens donc! — chez Talisman, le plus important foreur qu’a connu le Québec...

Idem pour le FondAction de la CSN qui, comme la FTQ, a du fric chez Inter Pipeline. L’entreprise de Calgary transporte la bagatelle de 1,2 million de barils d’hydrocarbures par jour sur des milliers de kilomètres. Pas moins de 35 % de sa production provient précisément des sables bitumineux de l’Ouest canadien... Le fonds de la CSN fait aussi confiance à TransCanada Pipeline, Enbridge, Canada Naturel Ressources, Alliance Pipeline, etc. Jacques Létourneau tenait tout de même la cadence avec les émules de Laure Waridel...

Chez les puissants rois du capitalisme mondial

D’autres leaders syndicaux marchaient pour le climat. Louise Chabot (CSQ) et Lucie Martineau (SFPQ) ne peuvent pourtant pas ignorer où la Caisse de dépôt et placement du Québec fait fructifier les milliards destinés à la retraite des profs et des fonctionnaires. Le butin bourgeonne notamment dans l’Ouest canadien et chez les plus puissants rois du capitalisme mondial: Royal Dutch Shell, Exxon Mobil, Gaz Prom, etc.

En regardant passer Steven Guilbault et l’armée du monde meilleur, je me suis demandé comment nos héros faisaient pour nous la jouer écolo. Pur opportunisme, sans doute. L’austérité, l’environnement, les négos... Peu importe l’endroit ou la cause, l’important, pour eux, est de se faire voir avec une foule. Ça ne change rien à leurs petits arrangements avec le capitalisme pétrolier.​






source -> http://www.journaldemontreal.com/
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Ce membre du 1% opposé au vol intergénérationnel…

Publié le  dans Amérique du Nord

Ce que cet homme d’affaires richissime a à dire ne concerne pas que les Américains : les inégalités résultent de l’égoïsme d’une génération assise sur une fortune.
Par Daniel Girard, depuis Boston, États-Unis
druckenmiller


Ils constituent 1% de la population américaine. Ils ont les poches pleines. Ils ont été la cible du mouvement mondial Occupy lancé à Wall Street en 2011 au nom des autres 99%. Ces 1% s’adressent rarement au reste du monde. Mais il y a des exceptions. Le gestionnaire de fonds Stanley Druckenmiller en est une. L’homme de 61 ans a fait une tournée des universités américaines pour dénoncer le vol intergénérationnel.
Qui est cet homme ? Stanley Druckenmiller a amassé une fortune de 2,9 milliards de dollars dans la gestion de portefeuilles. En 2009, il était le philanthrope le plus généreux aux États-Unis. Ses dons pour l’éducation, la recherche médicale et la lutte anti-pauvreté ont totalisé 700 000 000$.
Républicain ? Démocrate ? Ni un ni l’autre. Indépendant.
Est-il partisan d’un capitalisme pur et dur ? Pas du tout. Ses positions tranchent avec celles de Wall Street. Il n’aurait pas été fâché que l’Amérique déclare un défaut de paiement… Si cela avait mené à un accord de réduction de la dette.
La nouvelle génération finance les baby-boomers
Pour lui, c’est ça le véritable combat. Stanley Druckenmiller aura 62 ans en juin.  Dans trois ans, à l’âge de la retraite, il commencera à recevoir un chèque de 3 500$ par mois du gouvernement. Cela le révolte. « Avec tous les actifs que j’ai et la dette nationale qui dépasse les 16 millards, comment peut-on justifier cela ? » C’est cet esprit de révolte qui l’anime dans ses présentations aux étudiants.
Sa première conférence, il l’a faite à Bowdoin, dans le Maine, là où il a étudié. Graphiques à l’appui, il démontre que les programmes sociaux d’assurance-santé pour les personnes âgées, Medicare, et les pensions de vieillesse sont financés au détriment des  générations X, Y et Z.
Que s’est-il passé ? Les politiciens n’ont jamais cessé de hausser les prestations des aînés. Une personne qui a eu 65 ans va recevoir, jusqu’à sa mort, des prestations totalisant 327 400$. Les nouveaux-nés, eux, subiront des pertes nettes de 420 600$. Ce trou, ils l’auront creusé en payant les dettes des générations passées.
L’ironie c’est que Barack Obama aurait difficilement remporté les élections présidentielles sans l’appui des jeunes. Pourtant les jeunes sont les laissés-pour comptes de cette administration. C’est à eux que la génération des baby-boomers refile la facture de leurs programmes boursouflés. Les nouveaux diplômés amorcent leur carrière avec une lourde dette étudiante dans un marché du travail précaire affligé par le chômage.
Stanley Druckenmiller estime qu’il faut lier le versement des prestations de Medicare et des pensions de vieillesse à un examen des ressources financières. « Les gens de 60 ans ont des actifs cinq fois plus élevés que les gens de 30 ans, s’indigne-t-il, ce tranfert intergénérational doit cesser. »
Stanley Druckenmiller a fait sa présentation dans des universités très progressistes comme Berkeley, Brown et Stanford. Il a été chaudement accueilli par les étudiants. Ils lui ont demandé comment amorcer un mouvement de révolte. Il a répondu : « la mobilisation contre la guerre au Vietnam s’est faite avant les réseaux sociaux. Vous avez tous les outils dont vous avez besoin. »
Car le véritable combat contre les inégalités n’est pas lié à la nature du capitalisme. Il est plutôt relatif à l’égoïsme d’une génération qui est déjà assise sur une fortune. Une génération qui veut continuer de piger dans les poches de ceux qui l’ont fait prospérer.

L'AUTEUR
Daniel Girard

Daniel Girard

Journaliste et analyste politique qui suit de près la France et les États-Unis. Diplômé de maîtrise en administration publique de Harvard. Basé à Boston.


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PONZI!